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Le vélo : un moteur d’émancipation au féminin

Une cycliste à Paris / © Olivier Mabelly (Flickr - Creative commons)
Une cycliste à Paris / © Olivier Mabelly (Flickr – Creative commons)

Comment est née l’idée de ce Guide du vélo au féminin ? 

Louise Roussel : La première personne qui m’a fait monter sur un vélo ; celle avec qui j’ai débuté le vélotourisme ; celle qui m’a accompagnée sur mes premières longues distances… Je me suis rendue compte qu’à chaque fois, ces personnes étaient des femmes. Il y a donc de nombreux exemples de femmes qui pratiquent le vélo mais ils ne sont pas visibles. Au départ, je voulais faire le portrait de toutes ces femmes et puis j’ai rédigé une première partie qui est à la fois un récit de mon parcours – mon exemple montre que la pratique du vélo est à la portée de toutes – mais aussi des conseils pour s’y mettre. Les portraits viennent ensuite enrichir le guide.

En vous lisant, on réalise la dimension politique que revêt une femme à vélo…

Quand on porte viscéralement un sujet, tout devient politique. D’ailleurs, aux USA ou au Royaume-Uni, le vélo était l’un des symboles de la lutte des suffragettes : il leur permettait de se déplacer, de manifester, de transporter des pancartes… Je cite d’ailleurs cette phrase de la suffragette américaine Susan B. Anthony qui, en 1896, déclarait : « le vélo a plus fait pour l’émancipation des femmes que n’importe quelle chose au monde« . Et c’est vrai qu’en tant que femme qui fait du vélo, j’affirme que je peux aller où je veux, quand je veux, le tout sans dépenser d’argent. Dans le livre, j’évoque l’association Passer’elles à Lille qui enseigne à des femmes de quartiers populaires comment faire du vélo. Grâce à cela, ses femmes reprennent possession de leur corps, de l’espace. Elles se réapproprient leur mobilité, découvrent de nouvelles activités. Et si on veut que plus femmes se mettent au vélo, là aussi c’est éminemment politique. Cela nécessite de sécuriser l’espace public et les infrastructures.

Justement, un certain nombre de femmes hésitent à se mettre à la pratique du vélo en ville parce que cela semble peu sécurisant. Comment dépasser cette appréhension ?

Je pense que cela peut passer en premier lieu par l’équipement. Avec un casque et une veste réfléchissante, on est plus visible et on se sent donc plus en confiance. Il faut aussi se dire qu’avec l’habitude, en maîtrisant de mieux en mieux ses itinéraires, on gagne en assurance sur la route. Et puis je crois qu’il faut dédramatiser cette pratique. Globalement, sur un vélo, l’attitude est plus positive. Quand deux vélos se rentrent dedans, par exemple, les réactions des usagers sont beaucoup plus bienveillantes que dans le cas où un automobiliste emboutit le véhicule d’un autre. Un sourire, un « je suis désolée » et l’affaire est pliée ! 

Vous évoquez les villes où des femmes constituent des groupes de cyclistes. Quel est l’intérêt de ces collectifs ?

Effectivement, dans plusieurs villes, il existe des groupes de femmes qui choisissent de rouler ponctuellement ensemble. C’est le cas des Ovarian Psycosde Los Angeles ou des Women Ride à Nantes. Il existe des groupes mixtes, mais, dans un premier temps, on peut avoir peur de ne pas tenir la distance, d’être à la ramasse sur les questions techniques, de se faire lâcher. Les groupes de femmes permettent de prendre confiance et d’aborder aussi des sujets très féminins comme la pratique du vélo pendant les règles par exemple. Ces moments de non-mixité sont importants parce que, on le sait bien, les magasins de vélos comme les ateliers de réparation demeurent des espaces très genrés. Or, prenons l’exemple d’un atelier de réparation : les hommes vont avoir tendance à faire à votre place. Bilan : vous n’aurez pas appris à réparer vous-même votre vélo.

Dans le Grand Paris, avez-vous des lieux ou des associations vers lesquels les femmes peuvent se tourner ?

Il y a bien sûr les GOW : Girls On Wheels. Elles proposent notamment des sorties à vélo entre filles le mercredi soir. Je pense aussi à La Cycklette qui organise des ateliers d’auto-réparation. On peut aussi compter sur l’association Paillettes et Cambouis qui associe cyclisme, féminisme et rendez-vous festifs. Le vélo est un vrai outil d’empowerment !

Enfin, quel vélo conseillez-vous à une femme qui voudrait se mettre à une pratique plus régulière du vélo ?

Je lui dirais de prendre un bon vélo polyvalent. Comme par exemple un vélo de randonnée (ce qu’on appelle le VTC) ou alors un Gravel, qui est à mi-chemin entre le vélo de route et le VTT.

Infos pratiques : A vos cycles ! Guide du vélo au féminin, de Louise Roussel. Ed. Tana. Prix : 22€. En librairies le 6 mai et également sur librest.comparislibrairies.frfnac.comamazon.fr

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